études médicale

Cystite, antibiotiques, résistances 2022

CSB Klinik propose une étude réalisée par le Dr.Bouba Camara-Sampil, en collaboration avec le laboratoire Ketterthill. Cette étude propose une évaluation de la résistance à E. coli au cours des dernières années au Grand-Duché de Luxembourg.

La cystite, kézako?

La cystite est une infection de la vessie causée dans 70 à 90% des cas par la bactérie Escherichia coli. Cette dernière a vu son taux de résistance croître au cours de la dernière décennie compte tenu de la banalisation de l’utilisation des antibiotiques. CSB Klinik propose une étude du taux de résistance d’E. coli de janvier 2015 à mai 2022, en fonction des antibiotiques les plus prescrits en médecine ambulatoire.

CSB Klinik remercie le laboratoire Ketterthill d’avoir mis à disposition les données microbiologiques permettant de mener la présente étude.

Période : de janvier 2015 à mai 2022
Population : 58946 prélèvements d’urine d’hommes et de femmes

L’étude s’est focalisée sur les femmes car ces dernières sont davantage sujettes aux infections urinaires qui nous préoccupent ici. Parmi les antibiotiques testés : L’Amoxicilline, l’Augmentin, la Ciprofloxacine, la Fosfomycine, la Céfuroxime, la Nitrofurantoïne, la Triméthoprime/Sulfaméthoxazole et la Norfloxacine.

Taux de résistance observés

AntibiotiqueTaux de resistance
Amoxicilineautour de 42%, stable sur la période
Augmentinautour de 10% en 2015 et 2016, puis augmentation rapide de 21% en 2017 à 30% en 2022
Ciprofloxacineautour de 16%
Nitrofurantoineautour de 1.3%
Fosfomycineautour de 1,45%
Triméthoprime/Sulfaméthoxazoleautour de 20%
Cefuroximeentre 6% et 9% en 2015 et 2016 puis augmentation à partir de 2017 pour atteindre 13% en 2022,
Norfloxacinepeu contributif

L'étude

CSB Klinik propose une étude réalisée par le Dr. Bouba Camara-Sampil, en collaboration avec M. Damien Garot et le laboratoire Ketterthill. Cette étude propose une évaluation de la résistance à E. coli au cours des dernières années au Grand-Duché de Luxembourg.

Sujet

Cette étude veut montrer l’évolution du taux de résistance de E.Coli aux principaux antibiotiques utilisés couramment, sur la période de janvier 2015 à mai 2022. Elle compare l’évolution des taux de résistance à travers le temps, afin d’évaluer l’efficacité des différents antibiotiques entre eux.

L’étude se concentre particulièrement sur E.Coli car cette dernière est responsable de 70 à 90% des infections urinaires.

Patients et méthodes

Il s’agit d’une étude multicentrique rétrospective sur une centaine de sites de prélèvements répartis sur tout le territoire luxembourgeois, drainés sur un plateau technique situé à BELVAUX (8, avenue du Swing L-4367 Belvaux). Un recueil exhaustif des données d’antibiogramme des Escherichia coli isolés des échantillons d’urine, durant une période s’étalant de janvier 2015 à mai 2022, est effectué.

Paramètres

L’étude reprend les données portant sur les informations regroupant 58946 échantillons d’urine d’hommes (7544 soit 13%) et de femmes (51402 soit 87%).

La liste d’antibiotiques est celle des antibiotiques les plus couramment prescrits dans le traitement des infections urinaires, et dont l’efficacité est prouvée.

Les antibiotiques considérés sont les suivants : Amoxicilline, Augmentin, Ciprofloxacine, Fosfomycine, Nitrofurantoin et Trimethoprim/Sulfamethoxazole, Cefuroxime et Norfloxacine.

image illustration d'études
image illustration d'études
image illustration d'études
image illustration d'études
image illustration d'études
image illustration d'études
image illustration d'études
image illustration d'études
image illustration d'études
image illustration d'études

Voici les taux de résistance d’E. coli en fonction de l’antibiotique utilisé au cours des années :

Discussion

AntibiotiqueEvolution sur la période
AMC (Amoxicilline + acide clavulanique) :le taux de résistance subit un accroissement assez conséquent, passant de 10% en 2016 à 21% en 2017 à de 35% en 2018. Une chute de 5% est ensuite observée en 2022
CIP (Ciprofloxacin) : la bactérie présente un taux de résistance déjà important en 2015 soit 17% ; nous observons une évolution peu significative par la suite qui atteint à peu près 16% sur l’ensemble de l’étude
FTN (Nitrofurantoïne) : faible taux de résistance sur l’ensemble de la période inférieur à 2%
FOS (Fosfomycine) : faible taux de résistance de 2015 à 2022 (1,5%)
SXT (Triméthoprime / Sulfamethoxazole) : Taux de résistance assez stable sur les 8 ans (autour de 20%)
(ROX) Cefuroxime : le taux de résistance subit un accroissement entre 2015 et 2016 passant de 6% à 9% puis de 12% en 2017. Une stabilisation de 12% est ensuite observée de 2017 à 2022
NOR (norfloxacine) : taux de résistance élevé et évolutif : 17%, 21% , 24% en 2015, 2016, 2017. Nous ne disposons pas de données depuis 2018

Limites de l'étude

Pour l’ antibiotique NOR : Norfloxacine, nous ne disposons de résultats que pour les trois premières années de l’étude. En effet le laboratoire Ketterthill utilise des cartes VITEK de la firme Biomérieux pour réaliser les antibiogrammes. Selon les informations de laboratoire, ces cartes comportent un certain nombre d’antibiotiques, et lors de la mise à jour des cartes, certains antibiotiques sont remplacés par d’autres, en fonction de leur intérêt thérapeutique. Cela explique pourquoi certains antibiotiques ne sont plus testés systématiquement.

Dans les données brutes, le motif de prescription de l’analyse n’est pas précisé par le professionnel de santé.

Les antécédents des patients ne sont pas non plus recensés par le prescripteur.

Le nombre d’échantillons concernant les hommes étant nettement plus faible, nous ne nous sommes pas concentrés sur une quelconque interprétation (en moyenne moins de 2/1000).

La manière dont les prélèvements ont été effectués en données macroscopiques ne permet pas de tirer de conclusions sur l’impact qu’a pu avoir la pandémie.

Pour chaque antibiotique, nous n’avons pas d’informations quant aux posologies ultérieures utilisées en pratiques cliniques.

Hypothèse

Lors de la première étude, le Dr. Camara-Sampil avait supposé que la période de pandémie mondiale annoncée par OMS, le 11 mars 2020 pourrait avoir une incidence sur le taux de résistance pour certains antibiotiques, car éventuellement moins prescrits. Toutefois, les résultats des deux études ne permettent pas de confirmer cette hypothèse.

Par ailleurs, la pandémie ne semble pas avoir influé significativement sur le nombre de prélèvements annuels.

Conclusion

Lors de sa précédente étude, le Dr. Camara-Sampil faisait part de ses doutes quant à l’efficacité de la Fosfomycine et de la Nitrofurantoïne dans le traitement des cystites. En effet, il avait noté que de nombreuses femmes revenaient au cabinet pour une symptomatologie récurrente après un traitement à la Fosfomycine ou à la nitrofurantoïne.

La Nitrofurantoïne comme la Fosfomycine présentent un taux de résistance à E. coli très bas (environ 1,5%) par rapport aux autres antibiotiques présents dans cette étude, ce résultat étant très proche de la précédente étude (cystite antibiotique et résistance-étude 1). Ainsi, ces deux antibiotiques gardent leur légitimité dans le traitement antibiotique de premier choix de la cystite.

Deux idées ressortent de ce constat :

Il est possible que le constat d’inefficacité de l’antibiotique prescrit en premier lieu soit trop rapide, et que la prescription d’un second antibiotique soit précipitée. On risque alors de diminuer les effets du second antibiotique en le prescrivant trop souvent. On peut ici se poser la question de l’efficacité de la dose unique dans le cas de la Fosfomycine. Une étude chinoise publiée en 2013 montre qu’une posologie efficace consiste en trois doses sur 5 jours, à intervalles de 48h. Les données de cette étude chinoise sont encourageantes, notamment sur les effets secondaires très rares et légers (principalement des troubles digestifs). Cela permet de conserver une manœuvre thérapeutique de choix avec la Fosfomycine, qui présente un très faible taux de résistance à E. coli

Bibliographie

Laboratoire d'analyses médicales KETTERTHILLEvaluation of three-dose fosfomycin tromethamine in the treatment of patients with urinary tract infections: an uncontrolled, open-label, multicentre studyHôpitaux Universitaires de Genève - Infections urinairesThe Nebraska Medical Center - Fosfomycin : review and use criteria